Publication scientifique


IA pour la santé : Vers un système intelligent de monitoring, analyse et recommandation en immunothérapie contre le cancer

Le projet Qualitop, coordonné par le Pr. Hacid au LIRIS, a pour but d'améliorer la prise en charge du cancer, en utilisant des techniques d’intelligence artificielle afin de collecter et d'agréger efficacement des données médicales réelles sur la qualité de vie des patients.

La recherche sur l'immunothérapie contre le cancer a révolutionné la médecine. Qualifiée de cinquième pilier de la thérapie du cancer  - après la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie et la médecine de précision -, l'immunothérapie a permis des progrès significatifs dans le traitement du cancer. Seule ou en combinaison avec la chimiothérapie, l'immunothérapie a montré une grande efficacité dans certains cancers : jusqu'à 60 % de taux de réponse objective dans le mélanome et 80 % de taux de réponse complète dans la leucémie aigu? lymphoblastique. De nouvelles recherches offriront à davantage de patients atteints de cancers agressifs la possibilité de surmonter la maladie et une survie à long terme.

Comparée à d'autres types de traitements du cancer, l'immunothérapie est considérée comme l'une des options de traitement les plus complexes, car elle active la réponse immunitaire anti-cancer naturelle du corps pour attaquer et détruire le cancer. En activant le système immunitaire, l'immunothérapie entra?ne des toxicités ou des effets secondaires difficiles à prédire, comme ils ne sont pas causés par les mécanismes impliqués dans les autres thérapies du cancer. Ces effets secondaires sont appelés événements indésirables liés à l'immunité (EI-liés à l’immunité).

Après le début de l'immunothérapie, les EI-liés à l’immunité peuvent appara?tre à tout moment - quelques jours à plus d'un an après la fin du traitement. Leur durée varie considérablement et les sympt?mes les plus graves peuvent entra?ner une interruption du traitement. Les EI-liés à l’immunité sont fréquents (touchant jusqu'à 96 % des patients), mais leur impact sur la qualité de vie (QdV) n’est pas très connu.

En effet, la grande majorité des données sont collectées dans le cadre d'essais cliniques randomisés (ECR) dans un contexte standardisé qui se concentre sur l'inférence causale de l'efficacité du traitement. Néanmoins, dans la vie quotidienne, les profils et comportements des patients peuvent être très différents de ceux observés dans les ECR. Par conséquent, les données en vie réelle suscitent un immense intérêt et deviennent une source incontournable d'informations pragmatiques nécessaires pour divers intervenants (patients, proches, praticiens, pharmaciens, autorités de santé, population générale) et pour la mise à jour des recommandations. En attendant, de nombreux patients souhaitent être efficacement et adéquatement informés sur la meilleure approche de traitement dans leur cas spécifique, les options alternatives, les types et la gestion des effets secondaires, ainsi que l'impact du traitement sur leur vie, y compris l'état de santé, le mode de vie, la capacité de travail et la vie familiale.

Il existe actuellement trois principaux défis qui entravent l'amélioration de la qualité de vie des patients atteints de cancer après une immunothérapie :

  1. Déterminer des ? marqueurs prédictifs ? ou des ? sous-populations de patients ? associés au développement des EI-liés à l’immunité afin d'aider à prévenir, prédire et gérer ces effets et améliorer l'état de santé des patients. Ces éléments ne peuvent pas être déterminés dans les ECR en raison des critères d'inclusion stricts appliqués dans ces essais. Une analyse approfondie de nombreuses variables supplémentaires est nécessaire dans des populations de patients plus larges que celles incluses dans les essais cliniques.
  2. Mieux conna?tre la vie réelle des patients après le début de l'immunothérapie (mode de vie, polymédication pour traiter les sympt?mes associés aux EI-liés à l’immunité). En effet, dans les essais cliniques, les données sur la qualité de vie ne sont pas systématiquement collectées et, lorsqu'elles le sont, elles sont généralement évaluées sur de courtes périodes. De plus, la qualité de vie est évaluée à l'aide de questionnaires standardisés qui ne reflètent pas pleinement la réalité vécue par les patients. ?tant donné la complexité des causes des EI-liés à l’immunité, des études récentes ont souligné que certains sympt?mes rapportés par les patients dans les essais cliniques pourraient être des EI-liés à l’immunité mais ne sont jamais pris en compte.
  3. Afin de surmonter les deux défis précédents, des sources de données beaucoup plus diversifiées et un nombre plus élevé de patients doivent être inclus dans les études de recherche.

C’est dans ce contexte que s’est inscrit le projet H2020 QUALITOP (2020-2024), porté au Laboratoire d'Informatique en Images et Systèmes d'Information (LIRIS). Il avait pour objectif de développer et mettre en ?uvre une plateforme européenne sur l'immunothérapie basée sur l'analyse avancée de données, le recours à des techniques d’intelligence artificielle, et à des approches de modélisation par simulation pour collecter et agréger efficacement des données réelles sur la qualité de vie, surveiller l'état de santé des patients, réaliser des analyses d'inférence causale, élaborer des recommandations de réduction des risques pour les patients.

Les recherches ont abouti à la conception et le développement d’une plateforme d’intégration de données sécurisées (PoC) incluant :

  • Identification des besoins en données (qualification et pré-traitement) pour un monitoring efficace
  • Conception et l’implémentation d’algorithmes d’apprentissage pour le calcul de trajectoires patients et la génération de recommandation
  • Spécification et la mise en ?uvre du processus de monitoring intégrant des données statiques et dynamiques
  • Développement d’un ensemble d’outils d’analyse et de visualisation au-dessus du workflow de monitoring.
  • Enfin, le développement d’une approche d’interaction avec le système basée sur les grands modèles de langues (LLM)
L'équipe du projet Qualitop, regroupant des scientifiques de l'Université Claude Bernard Lyon 1, de l'Université Lumière Lyon 2 et des Hospices civils de Lyon

Le projet a bénéficié d'un accompagnement par Marta Esteban de la filiale Lyon Ingénierie Projets (LIP) de l'UCBL.

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Publié le 13 février 2025 Mis à jour le 18 février 2025